République tchèque
Les défis du BTP tchèque : logement, autoroutes, main d’œuvre
En Tchéquie, les autoroutes se construisent lentement et les appartements sont rares et chers. Mais selon les derniers chiffres officiels, la performance du secteur de la construction locale s’est améliorée. Découvrez les défis du secteur du BTP tchèque.
En Tchéquie, les autoroutes se construisent lentement et les appartements sont rares et chers. Ceux qui ont roulé sur la D1 récemment ou ont recherché un appartement vont être du même avis. Selon les statistiques économiques, la Tchéquie ne s’en sort pas si mal. Qui croire ? Les chiffres ou les avis d’une population mécontente ? Et quelle est la situation en France ?
Selon les derniers chiffres publiés par l’Office statistique tchèque (ČSU), la performance du secteur de la construction locale s’est améliorée de 2,1% en glissement annuel, la part majeure de ce succès provient du BTP avec 5% de croissance. Un plus grand nombre de permis de construire a été émis, la valeur des nouvelles commandes dans la construction a augmenté de 10% et le nombre de nouveaux projets s’est accru de 17,7% pour les maisons familiales et de 23,4% pour les appartements. De plus, à partir du 1er janvier 2018, plus besoin d’attendre longuement un permis de construire pour une maison individuelle. Il suffira de déposer un avis de construction. Les employés du BTP, qui ont vu leur salaire moyen augmenter de 8% pour s’établir à 41 500 CZK brut (1660 EUR). sont plutôt satisfaits. A titre de comparaison, le salaire mensuel moyen tchèque est de 29 050 CZK.
L’augmentation de la valeur des projets de construction ainsi que celle des salaires a un impact négatif sur le consommateur final, l’acheteur de bureau ou d’appartement. En l’espace de deux ans, les prix des logements ont augmenté en République tchèque de 40% ; chiffre le plus fort de toute l’UE. Le prix du m² à Prague atteint en moyenne 80 000 CZK (3200 EUR), et 120 000 CZK pour l’immobilier haut de gamme.
La France et notamment Paris luttent avec des prix du logement qui s’envolent. L’ex-président François Hollande s’est donné comme défi de construire 500 000 logements par an pendant son mandat. La barre des 500 000 n’a pas été atteinte pendant le quinquennat, mais peu s’en faut. A la fin de son mandat, en 2017, plus de 400 000 logements étaient construits.
La croissance des prix du logement s’accélère. Au troisième trimestre elle était de 4% pour l’ensemble du pays et de 8% à Paris. Le prix du m² dans la capitale française a dépassé la barre des 9000 euros, ce qui est pratiquement le triple des prix de Prague. Cependant les charges liées au logement représentent la même part du budget pour des foyers tchèques et français (26%), tandis que la moyenne de l’UE est 22%.
Propriétaire, locataire
Le prix des logements et leur indisponibilité représentent un souci dans bien d’autres pays que la Tchéquie et la France, mais l’approche à la solution varie. Les Tchèques aiment être propriétaires de leur domicile. Seuls 20% d’entre eux sont locataires, alors que la moyenne de l’UE est de 30 %, en France de 36% et les grands champions sont les Allemands avec 40 % de locataires.
La France se caractérise par une part importante de logements sociaux, régulés ou subventionnés par l’État. Pour pouvoir comparer les financements de logements sociaux par pays, l’Eurostat utilise le SPA (standard de pouvoir d’achat qui permet de se procurer la même quantité de biens et de services dans tous les pays). En France le chiffre atteint 250, en République tchèque il est de l’ordre de 60. Le seul pays qui subventionne plus que la France est le Royaume Uni. L’Union Européenne, qui se situe à 93, se divise en une dizaine de pays « généreux » et une dizaine d’autres où les gouvernements ne donnent quasiment rien, parmi eux, le Portugal, la Croatie et la Slovaquie.
En France les logements sociaux représentent 17 % des résidences principales (4,8 millions de ménages soit une famille sur six) et seulement 2,7 % en Tchéquie. En ce qui concerne la construction de nouveaux logements, les villes tchèques sont encore moins engagées, avec 1 % de leur investissement dans la construction. Ainsi, les villes tchèques ne disposent pas de biens suffisants pour pouvoir influencer les prix des loyer sur le marché.
Les autoroutes en (éternelle) construction
Les infrastructures obsolètes freinent le développement de l’économie tchèque et la construction des routes est une des composantes les moins performantes au sein de l’économie la plus rapide de l’UE. Alors que la croissance du PIB tchèque atteint 5 %, l’ingénierie des transports peine à dépasser zéro. Pour 2018, le gouvernement prévoit de construire au total 18 kilomètres d’autoroutes, mais de nombreux projets sont freinés dû à l’absence de permis de construire ou de difficultés rencontrées pour l’achat de terrains.
Un amendement de loi proposé par le gouvernement pourrait faciliter la construction car elle donne à l’État la possibilité de faire des fouilles et des travaux préparatifs sur des terrains qui ne lui appartiennent pas. Une loi similaire, dont le but est d’accélérer la construction de projets publics majeurs, est déjà en vigueur en Allemagne et depuis l’année dernière également en Slovaquie.
Alors qu’en Tchéquie l’État gère lui-même les autoroutes et emploie un administrateur privé uniquement pour les péages de camions et de bus (les voitures ayant des vignettes à l’année), l’approche française est nettement différente. Le gouvernement français, cède la gestion des autoroutes à des entreprises privées telles que Vinci, Eiffage et l’espagnole Abertis qui détiennent les trois quarts du réseau autoroutier français et bénéficient de contrats de concession sur plusieurs décennies.
Les péages en France concernent tous les véhicules. Pour rattraper un gel des tarifs autoroutiers en 2015, et pour financer 57 nouveaux chantiers, les automobilistes français devront mettre la main à la poche et débourser de 1 à 4 % de plus à partir du 1er février 2018. De quoi faire grincer les dents, mais de quoi inspirer les gouvernements tchèques...
Cet article est issu du magazine Contact n°87